Imaginez un instant : vous avez faim, vos enfants aussi, mais il n’y a rien dans la marmite. Pire encore — vous savez que, dans quelques semaines, même ce que vous receviez à peine pour survivre ne sera plus là. C’est la réalité que redoute aujourd’hui plus de 500 000 personnes au Cameroun, selon une alerte lancée par le Programme alimentaire mondial (PAM).
Faute de financement, l’agence des Nations Unies prévient qu’elle sera contrainte, dès fin août 2025, de suspendre son aide vitale à :
- 240 000 réfugiés et déplacés (Nigérians, Centrafricains et Camerounais chassés de chez eux par les violences),
- plus de 200 000 enfants, femmes enceintes et mères allaitantes qui dépendent de suppléments nutritionnels pour ne pas sombrer dans la malnutrition,
- 60 000 écoliers qui comptent sur le repas scolaire comme seul vrai repas de la journée.
Le PAM lance un appel urgent : 65,5 millions de dollars sont nécessaires pour tenir les six prochains mois. Sans cet argent, l’aide s’arrête. Tout simplement.
« Une mère qui se prive pour que ses enfants mangent »
« Plus d’un demi-million de personnes risquent d’avoir faim », souligne Djaounsede Madjiangar, porte-parole du PAM pour l’Afrique de l’Ouest et centrale. Mais derrière ce chiffre, il y a déjà plus de deux millions de Camerounais confrontés à une faim aiguë — une souffrance silencieuse, mais bien réelle.
Les causes ? Elles sont connues, mais cruellement persistantes :
- Les conflits qui empêchent les paysans de cultiver leurs champs,
- Les chocs climatiques — sécheresses, inondations — qui ravagent les récoltes,
- Et surtout, la flambée du coût de la vie, qui met la nourriture hors de portée de trop de familles.
Dans les camps de réfugiés, la situation se dégrade déjà. À Minawao, dans l’Extrême-Nord, et à Gado, dans l’Est, les rations ont été réduites le mois dernier. Et les témoignages brisent le cœur.
« Une mère nous a dit qu’elle refuse de manger pour laisser sa part à ses enfants », raconte Djaounsede Madjiangar. « Beaucoup de familles sautent des repas, d’autres vendent leurs derniers biens — une casserole, une couverture, parfois même leurs vêtements — juste pour acheter un peu de nourriture. Jusqu’à quand tiendront-elles ? Personne ne le sait. »
Un cri d’alarme qui résonne au-delà des frontières
Ce n’est pas la première fois que le PAM sonne l’alarme. En juillet, c’était au tour du nord-est du Nigeria de faire face à un effondrement imminent de l’aide humanitaire. Aujourd’hui, c’est le Cameroun qui vacille. Et demain ?
Le message est clair : l’indifférence coûte des vies. Ce n’est pas seulement une question de logistique ou de budgets — c’est une question d’humanité. Chaque dollar manquant, c’est un enfant qui risque la malnutrition, une mère qui se prive, un avenir qui s’effrite.
Mais il n’est pas trop tard.
Il suffit que les bailleurs internationaux — gouvernements, fondations, citoyens solidaires — répondent à l’appel. Parce qu’au Cameroun, comme ailleurs, personne ne devrait avoir à choisir entre manger et laisser ses enfants manger.
Et si nous pouvons empêcher cette tragédie annoncée, alors agissons — maintenant, avant que le silence des marmites vides ne devienne assourdissant. 🍲💛